Interview : Hey Hey My My

Quand je suis revenue en France, tout le monde n’avait qu’un nom à la bouche : Hey Hey My My, la sensation folk de 2007. Leur nouvel album, A Sudden Change of Mood, va en étonner plus d’un. Un revirement extrême ? Julien Gaulier et Michel Aubinais remettent les choses  à plat et en perspective.



Hey Hey My My
Hey Hey My My - le retour!




Hey Hey My My


Déjà, ils sont pas d’accord sur le terme de sensation 2007 : « On a pas senti cet engouement extrême. Oui c’est cool on a pu tourner, on a vendu quelques disques, mais on a vendu que 10.000 albums du premier, donc c’est pas énorme – même si on nous a vus partout. Le bouche à oreille a été progressif, on s’est fait connaître petit à petit. On était sur un label indé, qui avait pas beaucoup de moyens de promotion, donc ça a mis du temps. Ceci dit on a eu un développement classique de groupe indé. »

Que s’est-il passé depuis 2007 ? « Après le premier album, quand on s’est remis au travail, on a intégré Michel (batteur de British Hawaii). Du coup on a commencé à composer tous les trois et  on avait des automatismes, on se connaît bien, on avait l’habitude de jouer ensemble sur British Hawaii. Et très naturellement, comme la batterie était enregistrée en live plutôt qu’en boîte à rythmes, le côté rock s’est développé tout seul et a pris le pas sur ce qu’on avait fait sur le premier album. »

Cet album sonne-t-il le glas de British Hawaii ? « Avant on avait British Hawaii et Hey Hey My My était le side project : c’était les chansons folk qu’on avait faites avec Julien et qu’on avait petit à petit étoffées. On était vraiment sur des chansons faites à la maison – sans vrai batterie, à part pour l’enregistrement en studio avec Michel.
British Hawaii c’est tout un monde qui est très violent et très très speed. Je sais pas encore si physiquement je peux les chanter : c’était vraiment à fond la caisse. C’était l’envie qu’on avait à l’époque, un peu des folies de jeunesse, c’était moins maîtrisé que ce qu’on fait maintenant avec Hey Hey My My. »

Ils m’inquiètent, le punk serait donc voué à mourir ? « Le punk, ça veut tout et rien dire : Gorillaz peut être considéré comme du punk. A partir du moment où tu fais ce que tu veux, c’est punk. Joy Division c’est du punk : tu sais pas jouer, tu prends une guitare et tu joues quand même. C’est pas un style de musique hard-core, l’esprit se retrouve dans l’expérimentation et surtout de faire ce qu’on a envie de faire : pas besoin d’être un pro de la musique. Oui donc l’image de Gorillaz n’était pas très bien choisie. »

Est-ce qu’on peut parler de revirement avec leur nouvel album ? « Certes, on joue un peu là-dessus avec le titre ‘A Sudden Change of Mood’… oui, on suit une autre piste, mais mélodiquement parlant, ça doit être assez lié au premier. C’est difficile à dire, on avait l’impression d’avoir fait le grand écart, mais les retours qu’on a eus n’étaient pas choqués outre mesure. On n’a pas assez de recul, il est tout chaud l’album.
Pour nous, il n’y a pas l’ancien groupe folk et le nouveau groupe rock, d’ailleurs en live on va mélanger les deux. On espère que ça va plaire, mais je pense pas que la différence soit choquante, on fait pas du trash métal non plus. »

Ils ont apporté plus de soin à la production et plus de travail aux paroles. « Avant, on avait peur de faire connaître les paroles et pour ‘A Sudden Change of Mood’, on assume. C’est moins romantico-mélancoliques, plus imagé, c’est un peu plus noir à mon avis. Le tout c’est de garder un truc ouvert aux interprétations, que ce soit pas pré-défini comme des merdes qu’on écoute à la radio. »

Leur nouvel album serait donc un pont entre Hey Hey My My et British Hawaii. « Sur A Sudden Change of Mood, on retrouve cette énergie mais au lieu d’envoyer du bourrin pendant 40 minutes, on retrouve l’esprit punk sur certains titres : ‘Pull’ par exemple est une chanson de British Hawaii. Ce nouvel album est vraiment représentatif de nous trois. On fera peut-être des concerts de Britsih Hawaii un jour pour rigoler. Cette histoire de double groupe c’était un peu bizarre, limite schizophrène.
Le travail sur A Sudden Change of Mood a été un tout beaucoup plus sain, ça a évolué, on a eu le temps de bien les préparer, et de les répéter tous les trois. C’est naturellement que les deux mondes se sont rencontrés. »

Pour cet album, ils ont fait appel au producteur Tony Hoffer (Supergrass, Air, The Kooks, Beck…). « On voulait un son rock et « américain », donc on a eu envie de faire appel à Tony Hoffer. On lui a envoyé après l’enregistrement et le pré-mix des titres. Il a mis du relief, pour renforcer les choses qu’on avait déjà commencé à mettre en exergue. On lui a donné quelques micros indications, mais le but était de laisser faire quelqu’un d’autre, pour justement que ça sorte du côté confiné. Il a vraiment chopé l’idée, il a vraiment fait du rock. »


J’essaye de les titiller: ils suivent les tendances en somme! « Mais ça c’est fou ça! Cocoon, Moriarty, tout ça, toute cette planète, ça s’est emballé après qu’on ait sorti notre album ! Et maintenant on voit fleurir tous ces groupes folk dans le Mainstream. Jil Is Lucky, Yodelice, avec sa guitare folk et son chapeau, Charlie Winston tout ça… Toute cette inspiration vendue en tant que telle : chanteur folk/chanteur à guitare acoustique. C’est pas ce qu’on recherchait ! Notre premier album était très proche des démos qu’on avait enregistrées chez nous : on avait des guitares acoustiques parce qu’on ne pouvait pas faire beaucoup de bruit. »

Ils en profitent pour repréciser l’AOC ‘folk‘. « On ne rejette notre côté folk, cela dit, ce terme a été mis à tort sur cette scène française : la folk c’est un truc contestataire des années 60s qui est vraiment lié à Bob Dylan. On faisait plutôt de la pop et on nous a collé cette étiquette – on l’a accepté avec plaisir… Mais mis à part le fait qu’on joue avec des guitares acoustiques, on a pas grand-chose à voir avec la folk. »

Sur sa lancée, Julien part sur cette marketisation des groupes – après tout, ils se sont rencontrés en école de commerce: « En ce qui nous concerne on a pas eu une image très précise ou « cohérente » par rapport aux canons de marketing actuels… Notre image ou la façon dont les gens nous perçoivent va se faire sur plusieurs albums. On va pas se mettre à porter des slims parce qu’on est un groupe de rock, tout comme on portait pas de sandales quand on était un groupe de folk. On s’en fout des slims : on n’est pas dans la revendication d’une image, ça nous intéresse pas. »

Album A Sudden Change of Mood disponible à partir du 26 avril 2010.

Hey Hey My My sera en concert le 5 mai à la Maroquinerie.


Merci aux Waaa pour avoir organisé cette interview.

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