Eldorado Music Festival // Samedi 21 septembre
Warhaus
Le paysage des songwriter va connaître une nouvelle révolution. Maarten Devoldere, chanteur et compositeur du groupe belge Balthazar risque de redistribuer la donne, depuis que ce dernier s’est lancé dans un projet solo baptisé, Warhaus. A l’heure d’internet et des secrets dévoilés, ses chansons n’ont pas filtré sur la toile et c’est tant mieux. Il n’en est que plus intense de les découvrir en live, vierge de toute impression. Plongé dans une quasi obscurité, Maarten se présente seul sur scène. Nul artifice scénique ou vestimentaire, Maarten s’est armé de sa seule guitare et d’une loopstation. Sensible et dépouillée, sa musique vous prend aux trippes et vous submerge. Il manie les arrangements et jongle avec les instruments. Il se fait multiple, se sample avec une trompette, un xylophone, ou encore un mélodica. On a qu’à fermer les yeux et on se croirait dans un road movie, parcourant l’ouest américain jusqu’au nouveau Mexique. Sa voix est un subtil mélange entre l’errance d’un Leonard Cohen et la force d’un Iggy Pop. L’homme n’est pas adepte des longs discours. On le regrette un peu car on aurait aimé percer un peu son secret et partager ses errances.
Olivier Libaux
Le café de la Danse affiche complet et ce n’est pas un hasard car sur scène, l’homme qui est attendu, est un inventeur voire un réinventeur, une sorte de magicien de la métamorphose sonore. Olivier Libaux est connu pour avoir créer en 2004 le projet Nouvelle Vague avec Marc Collin.
Cette année, il revient avec un projet tout aussi ambitieux et s’attaque aux titres du mythique groupe de rock les Queens of The Stone Edge. C’est avec l’aval et toute la confiance du maestro Josh Homme, qu’Olivier Libaux a pu laisser libre court à sa relecture toute personnelle d’une dizaine de titres. Comme à l’accoutumée, il a su se parer des meilleurs atours et a choisi des interprètes aux voix d’exception pour sublimer encore plus chacun des morceaux : Alela Diane, Rosemary Standley (Moriarty), Ambrosia Parsley (Shivaree), Emiliana Torrini…
L’occasion était donc trop belle pour passer à côté et découvrir pour la toute première fois sur scène, la version live de l’album « Uncovered Queens of The Stone Edge ». Sur scène, les trois musiciens (Olivier Libaux à la guitare, Guillaume Zeller aux claviers et Mathieu Gayout à la batterie) sont installés très discrètement au second plan alors que les deux chanteuses (Karen Lano et Nathalie Réaux) sont postées en première ligne. Une mise en scène sobre qui sonne comme une évidence, mais qui révèle toute l’importance donnée à ces deux voix. Les mélodies sont simples et dépouillées de tout artifice.
Alors que des morceaux comme Burn The Witch ou encore The Lost Art Of Keeping A Secret, conservent leur noirceur, quelques airs de bossa réchauffent l’atmosphère et rappelle que l’esprit de Nouvelle Vague n’est jamais bien loin. Cependant, le trio ne dénature en rien l’esprit des QOTSA et enrichit même les titres de délicates harmonies. Les voix chaudes des deux chanteuses s’entrelacent et épousent parfaitement les mélodies. On se laisse facilement dériver et emporter dans un rêve éveillé. Les textes émergent, plus bruts que dans la version originale. Ils apparaissent comme par magie et ce sont de nouveaux morceaux que découvre le public même pour les plus fans des QOTSA. Même épurées, les mélodies portent l’empreinte de la noirceur à l’instar de Feeling Good Hit Of The Summer et l’énumération lancinante de différentes drogues ne fait que le renforcer : nicotine, valium…
Le concert s’achève après deux rappels chaudement réclamés par le public. Ce qui est sûr c’est qu’en live, la performance est plus que réussie et que ce n’est certainement pas le fruit d’une illusion.
Eldorado Music Festival // Dimanche 22 septembre
Peggy Sue
Peggy Sue, c’est l’équilibre parfait entre délicatesse et rudesse, douceur et violence. Oui tout est une question d’équilibre et d’ambivalence dans ce groupe car quand on écoute pour la première fois, Peggy Sue, rien ne laisse supposer que le groupe vient de Brighton. On pense plutôt à l’ouest américain, à ses grands déserts qui s’étendent à perte de vue. Peggy Sue se compose de Rosa Slade (la blonde) et de Katy Young (la brune) qui illustrent à elles deux cette contradiction tant physiquement que vocalement.
C’est progressivement que Rosa et Katy, sous forme de chœurs, font leur apparition sur scène. Clé de voûte de ce groupe et postées en avant-scène, ce sont elles qui donnent le « LA ». Entre elles deux, c’est une escalade. Elles entraînent dans leur sillage, la batterie et la basse qui se font pesantes voire écrasantes.
Je découvre quelques titres de leur précédent album « Acrobats » comme l’entrainant Watchman, ou encore Funeral Beat, tribal rappelant des incantations indiennes. C’est hypnotisant et le public semble littéralement subjugué. Rien de les effraie et c’est face à la salle dans un silence empli de respect, qu’elles entonneront une célèbre reprise, soutenue par la seule batterie, Hit The Road Jack. Chose incroyable, elles en arriveraient presque à nous faire oublier l’interprétation originelle du grandissime Ray. Bref, Peggy Sue c’est une musique qui puise sa force dans les racines du blues et qui se vit de l’intérieur. Avec un nouvel album prévu l’an prochain, « les » Peggy Sue risquent très vite de faire parler d’elles.
Laura Marling
C’est sur une scène débarrassée de tout instrument et dans une chaleur quasi suffocante que la jeune chanteuse (à peine 23 ans et 4 albums à son actif) s’avance, armée de sa seule guitare sèche. Avec sa silhouette sylphide, son teint d’albâtre et sa chevelure blonde, elle a tout d’une déesse… de la folk bien sûr.
Pas de longs discours, elle amorce son set avec Take the night Off, un extrait de son dernier album Once I was an Eagle. La puissance de sa voix, la conviction de son phrasé, associés à son jeu énergique, plonge immédiatement la salle dans un silence religieux. Le public suspendu à ses lèvres boit alors ses paroles et assiste à la surprenante métamorphose de cette jeune femme au physique de porcelaine en cette femme volontaire et guerrière. Les paroles résonnent et prennent tout leur sens «Take the night off, And be bad for me».
Dans un registre plus calme, elle enchaîne des morceaux comme You know, ou encore Breathe. S’ensuit Master Hunter qui redonne un coup d’accélération au set. La voix est puissante, son charisme ne fait aucun doute. Le talent n’attend pas le nombre des années, avec elle c’est une certitude. Tandis que la chaleur dans la salle devient intenable, des frissons me parcourent le corps, à l’écoute des premières notes de Goodbye England (Covered In Snow), extrait de son album « I Speak Because I Can ». Sa voix oscille, vibre et vous emporte dans le froid mais surtout dans un voyage où les émotions explosent et sont exacerbées.
Devant la température tropicale du Café de la Danse, Laura (en sueur) demande non sans humour, au public de stopper les photos et de l’épargner ne se jugeant pas à son avantage (jolie coquetterie). La communication passe bien, elle s’amuse et prend vraiment plaisir à jouer et surtout à échanger. Elle terminera ce set avec Sophia et Where I can go, avec sa voix un peu plus écorchée et vibrante qui ne laissera ce soir là personne insensible. Après une heure de scène et sans rappel, les lumières se rallument. Ce fut intense mais j’avoue bien trop court…