On croyait qu’il avait tout bonnement abandonné la chanson, comme il avait auparavant laissé tomber sa sublime chevelure bleachée à la texture rappelant vaguement un ramen au poulet. Du jour au lendemain, sans déclaration officielle, ses fans avaient été mis devant le fait accompli : Justin Timberlake et la chanson étaient de l’histoire ancienne.

« JE SUIS COMÉDIEN. »

Soit, mais pour les aficionados du « Sexy Back », la pilule était difficile à avaler.

Puis, le 10 janvier dernier, la nouvelle est tombée comme une tonne de brique.  Il était prêt !

Oui, il était prêt.  Et le chanteur faisait plus que simplement entrer en studio pour faire des back vocals sur un futur hit pop d’une mini-Beyoncé ou d’une mamie-Madonna en manque de fraîcheur.  Un nouvel album de Justin, un premier depuis sept ans, était bel et bien en chemin.

Sept longues années se sont écoulées depuis FutureSex/LoveSounds, aujourd’hui un classique des années 2000.  Intitulé The 20/20 Experience, j’avais très hâte de découvrir la direction sonore de ce nouveau disque.  Justin allait-il se mettre à la sauce dance comme la plupart des artistes américains habitués au Top du Billboard ?  L’attente allait être de courte durée car dès janvier, le premier single nous a été servi.  Suit & Tie en featuring Jay-Z donnait le ton : rétro, classe et étonnamment difficile d’accès.

Justin Timberlake souhaitait marquer son retour à la musique avec tout le panache que lui attribue la presse spécialisée. C’en était terminé de la pop/RnB où il avait jadis excellé avec son groupe ‘N Sync jusqu’à ses tubes en solo.  Ici, le chanteur plongeait tête première (et sans pince-nez) dans les sonorités néo soul, cette couleur des années ’70 et son côté orchestral, mais avec utilisation d’instruments modernes.  Un pari osé, mais qui n’a pas déstabilisé ses fans; le single Suit & Tie ayant effectué des ventes plutôt faramineuses en première semaine.

L’album en lui-même est assez cohérent.  Les compositions des dix titres (deux de plus sur l’édition Deluxe) sont plutôt semblables et rappellent un principe qui lui était propre lors de son précédent album : prendre deux chansons pour n’en faire qu’une et où la seule différence se situe sur un changement de beats quelque part entre le bridge et l’avant-dernier refrain.  The 20/20 Experience se retrouve donc avec des chansons plutôt longues (de 7 à 8 minutes en moyenne), mais qui ne souffrent d’aucune répétition inutile.

Pourquoi changer une équipe gagnante ?  Si le son de Timberlake a évolué, ce n’est pas par désir de se tourner vers de nouveaux collaborateurs.  Déjà présent sur ses deux premiers albums, Timbaland est de nouveau à la production.  L’inconvénient d’avoir un seul producteur sur un album est d’avoir droit aux mêmes sonorités pendant près d’1h30.  Épaulé par son fidèle producteur Timbaland, le chanteur n’a pas ménagé les efforts: longues compositions aux structures atypiques, influences variées (électro, soul, R&B, crooner, afrobeat), passages atmosphériques. The 20/20 Experience se rapproche davantage à un album-concept d’ambiance qu’à une collection de succès pop.  Sur ce point, j’imagine que les « party animals » seront déçus.

L’ambition est louable, mais au final, Timberlake semble avoir oublié le facteur «plaisir», ces mélodies simples et efficaces qui vous rendent le cœur léger et vous donnent envie de vous dandiner au son de sa voix de tête. On retrouve bien quelques hymnes aussi entraînants que nourrissants (Pusher Love Girl, Suit & Tie, Let the Groove Get In), mais The 20/20 Experience apparaît comme un disque plus calculé qu’instinctif.

Avec les succès des deux premiers singles, Suit & Tie et Mirrors, le retour musical de Justin Timberlake est réussi.  Mais son album mérite-t-il un 20 sur 20 ?

Je lui décerne un 15 sur 20 facile (accompagné d’une petite étoile dorée sur sa copie).