Garorock 2011

Vendredi. 15h. 1000 degrés.
Au troisième Garorock je me permettrai de dire qu’il n’est plus vraiment nécessaire de décrire l’ambiance du festival. Qu’il pleuve ou qu’on crame comme cette année, l’apéro est la religion prioritaire des campeurs – le sud-ouest, ca ne s’invente pas. Garorock n’est pas, non plus, le paradis des aracnophobes. J’ai pourri mon seul pantalon en renversant mon verre parce qu’un caniche m’a fait peur. Il fait chaud le jour et froid la nuit, et aussi tard que vous puissiez rentrer en titubant gentiment dans la navette où l’on chante Francis Cabrel (ceci n’est pas ironique, j’adore Francis Cabrel) eh bien dites-vous que vos voisins seront forcément moins fatigués que vous. Et qu’ils adoreront Massilia Sound System. Mais Garorock c’est une tradition. Alors tu remets ton pantalon trempé, tu fais amis avec les araignées, et tu finis l’apéro.

Quand on arrive, Morcheeba fait son truc étrange de mélanger tous les styles musicaux les plus sombres et le pot pourri résultant est somme toute moins désagréable que prévu. Le trio donne un côté mystique à notre début de soirée avec l’aimable participation de la robe de Skye Edwards de retour dans le groupe pour l’album « Blood like lemonade ».
On préfère répondre direct à l’appel ultrason de l’espace VIP histoire de ne pas céder à la tentation, plus tard. Du vieux invité, du verre qui traine à outrance, de l’accrédité à plus savoir qu’en foutre qui s’attèlent à s’emmerder et à ignorer, blasés, la musique au loin et le temps qui passe et Bewitched Hands avec lui. Et vous prendrez bien encore un peu de champagne… Une motivation générale se fait sentir, un brin de passion extatique, et pose ton verre et bouge tes fesses.

Designer drugs & Fukkk offf s’enchainent dans le « Garoclub » à une heure où plus personne n’a franchement conscience de quoi que ce soit et il faut dire que les programmateurs du weekend avaient probablement tout prévu. Jukebox humain, les américains de Designer Drugs envoient du lourd genre soundtrack de rêve psyché, effets hallucinogènes garantis. Leur nom d’un coup d’un seul, coule de source. Ca donnerait presque franchement envie de se mettre à l’électro. Fukkk Offf passe carrément dans le flou. Un joli nuage de lumière sur un fond de musique rythmique bumbum bum bim bam boum etc… Une pause s’impose.

Etienne de Crecy

Une pause Etienne de Crecy. Bon, une pause Etienne de Crecy – frites en fait. Même de loin, même s’il fait un peu moins chaud, même sans danser comme une campeuse sous prod renversant de la bière sur ses voisins eh bien sachez qu’Etienne de Crecy est appréciable. Un équivalent de Mr. Oizo de l’année dernière sans les menaces de mort. Ambiance décollage de fusée rétroactive. Le gars vient sérieusement d’ailleurs, un monde lointain où le son n’a pas la même forme et les oreilles pas la même résistance. Mais un monde somme toute plutôt ouf.
Et j’ai mes limites qui sont là, juste là entre Etienne de crecy et le début de High Tone à 4h quelque part. Entre mon sac de couchage et ma colocataire d’araignée.

The Shoes

Samedi
. 13h. Probablement 8000 degrés à Marmande. Personne ne bouge avant que le soleil ne descende.
Vers les 20h, les banjos commencent à résonner au camping ce qui sonne le glas de notre départ.
Gros coup de cœur du weekend, The Shoes envoient grave du pâté et tout ce qui va avec. Il fait chaud et pas seulement parce que les deux rémois (ndlr, habitants de Reims, incultes) ont des gueules de mecs de Brooklyn. « People movin’ » est taillée pour le live et même fatigués et sous doliprane, on se laisse avoir sans opposer de résistance par leur son électro pop gentiment game boy à l’occasion.
The Shoes fait office de révélation, je me laisse faiblement séduire par la voix de Guillaume Brière et/ou Benjamin Lebeau, genre Morrissey sur un mélange de Klaxons et de Yuksek – sans l’effet pot-pourri que cette formulation laisse entendre. Proches des Bewitched Hands qu’on a scandaleusement loupés la veille, les Shoes sont toxiques, brillants et bruyants. Parfaits.
Et tout ça nous rappelle qu’on dirait bien que les français savent encore faire deux, trois trucs. Pas tout quand même.

A l’image de Jamaica qui se dandine sur la Digitick mais n’emballe pas. Pas de montée de température, pas d’hémoglobine en folie, juste un gentil déhanchement trivial déclenché par des corps en pilote automatique.

Jamaica

On va chercher plus de passion tribale chez Toxic Avenger. Simon Delacroix y donne du sien mais mon esprit est resté bloqué sur The Shoes. « Angst » marche pourtant très bien sur l’assemblée, les silhouettes sautillent sur les bancs et se perdent dans le noir.

23h45 sur la grande scène – suspense. On attend The Streets en se disant que leur présence est la raison de la notre.
J’aurais très honnêtement voulu donner dans l’éloge excessif, la prose hyperbolique et le superlatif générationnel. Je voudrais écrire que la séparation imminente des Streets marque un tournant accidenté dans l’histoire du faux rap anglais, et il n’y a que deux solutions à cette irrémédiable impossibilité. Soit je ne suis donc pas génétiquement crée pour m’extasier sur autre chose que sur du sombre rocky punkinou brooklynite soit The Streets m’ont déçu. Ou Mike Skinner est juste meilleur sur CD. Mais l’anglais et son acolyte que j’en viens même à avoir la flemme de googler ne sont pas mauvais et il faut reconnaitre à Miky un certain charme. « Fit but you know it » est toutefois assez peu reconnaissable. Et lorsque les dernières notes s’évaporent dans la fumée étincelante de cette brumeuse nuit d’été – « les filles, vous pouvez nous dire quelques mots sur le concert ? » – non – « juste pas longtemps » – c’était mieux sur mon ipod – « ouais ok c’était pourri. » Next. C’est donc dans la bouche d’une brunette frangée qui n’a rien vu, rien entendu, que le verdict tombe, tristement.

The Streets

Je me traine jusqu’à la Digitick, oubliant presque que mes petits pieds m’amènent tout droit vers la quintessence rock’n’rollesque de ce que l’Angleterre nous offre aujourd’hui.
Des fans de Little Richard qui jouent aussi fort que Motorhead, ca frisouillait déjà l’extase. Mais le gel rockabilly des Jim Jones Revue dégage carrément à lui seul plus de testostérone que tous les mecs du festival réunis. Enfin un vrai bon retour aux sources, des guitares qui font du bruit, du jeu de jambe d’années passées, et du bon Jim Jones en transe. On sait où on est, on sait où on va. C’est même un peu cruel d’avoir programmé les anglais en même temps que The Streets ce qui m’oblige à des allers retours déchirants (ou presque). Jim & ses petits camarades s’agitent sur scène, bouillants dans leurs vestes en cuir. Rupert Orton remet tous les petits minets à guitare à leur place. Le chanteur du groupe a un jour défini les ingrédients du rock’n’roll comme étant « le swing & l’intensité », rassurez-vous Jimmy a tout ce qu’il faut.
Les Jim Jones Revue ; une bande son parfaite pour une baston à l’antivol défoncé dans une ruelle sombre à briques rouges. Pensez-y.

C’est légèrement hagard qu’on comprend que c’est l’heure de changer de style. L’équipe d’Ed Banger prend place sur la grande scène. On nous avait donné l’illusion d’une battle entre DJ Mehdi et Busy P mais les deux DJ joueront en fait chacun leur tour, c’est-à-dire que le premier chauffera le public pour le deuxième, grand manitou du mantra Let The Children Techno.
Busy P est bien gentillet mais il n’a pas le niveau réveille-les-morts d’Etienne de Crecy. Du coup, ben, on va se coucher.

Le dimanche est un jour spécial à Garorock. Le coq se réveille plus tard, les navettes se trainent, et le camping se vide.
Hangar s’agite déjà sur la grande scène, énergique et motivé. On en parle vachement mieux . Suivront en ce jour du seigneur, Julian Perretta, Breakbot, Sexy Sushi ou Aaron. Qu’on verra, bah une prochaine fois.


Photos par Camille Quancard & Rienavoirproduction.

4 commentaires
  1. Elise says:

    J’ai vu The Streets à Leeds et c’était un des meilleurs concerts que j’ai pu voir… Dommage que la magie n’ait pas opéré à Garorock… Pas eu le temps de voir Flobots?

  2. helene C says:

    J’ai lu quelque part qu’ils n’ont jamais réussi à être aussi bon en France.. peut etre un blocage psychologique!
    Non pas vu Flobots, j’ai loupé un truc de fou ?

  3. Elise says:

    La langue doit pas mal bloquer parce qu’à Leeds, il parlait tout le temps avec le public. ça doit jouer.
    Pour flobots, je ne sais pas, jamais vu en live mais j’aime bien leur musique.

  4. Daidix says:

    J’ai vu Flobots à la Maroquinerie la semaine dernière. Très sympa, bien qu’un tout petit peu répétitif à la longue.
    Les version live reste bien foutu et le groupe sympatique. À voir…

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